mercredi 31 décembre 2008

Hé DJ mets nous donc du funk !

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Texte de présentation trouvé sur le site des Disques biens (décembre 2007) :
Le Groupe Précédemment Connu Sous Le Nom De The Brassens (LGPCSLNDTB) devient La Pompe Moderne.
La pompe moderne - Album
La nouvelle est tombée comme un couperet : Georges a décidé de changer le nom de son groupe, formidable machine à faire des reprises.

En effet, à la veille même de la sortie de son nouvel EP, un événement est venu tout bouleverser : "Je venais d'abuser de délicieux encornets farcis. La digestion commença son dur labeur et je m'assoupis. Très vite, je me retrouvais catapulté dans un monde où tout portait mon nom. Les plaques des rues, les places de village, le perron des écoles, les MJC. Des nouveaux modèles de voitures arboraient affrontement mon patronyme, de même qu'une ligne de vêtements, une chaîne de télévision, même Cap Canaveral avait été rebaptisé sans vergogne. C'était un véritable cauchemar. Quand j'ai vu mon facteur se transformer en gorille, j'ai compris qu'il était temps de repartir à zéro."
Ce rêve est un véritable coup de poing. Georges comprend qu'il est temps de penser un nouvel espace de création pour s'affranchir du passé et reprendre pied avec son époque. Ce nouvel espace, c'est La Pompe Moderne. Georges demande alors aux Disques Bien de retirer l'intégralité des EP placés en magasin. Le label, qui dans un premier réflexe voulait partir vendre des sacs de lavande porte-bonheur en Thaïlande, décrète finalement une AG exceptionnelle et décident de soutenir son artiste. C'est la première fois dans l'histoire de l'industrie du disque qu'un label retire, à la demande de l'artiste, des cds disponibles à la vente (à la veille de Noël). Comme dirait Georges, "Rien n'a déjà été fait".


Ça se passe de commentaire... Moi, je suis total fan !

Bon réveillon à tous... Soyez prudents...



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lundi 29 décembre 2008

L'hiver...

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Giuseppe Arcimboldo (1526-1593) L'Hiver, 1563
Giuseppe Arcimboldo (1526-1593) - L'Hiver, 1563 - Musée du Louvre


Yver, vous n'estes qu'un villain



Yver, vous n'estes qu'un villain !
Esté est plaisant et gentil,
En tesmoing de May et d'Avril
Qui l'acompaignent soir et main*.

Esté revest champs, bois et fleurs,
De sa livree de verdure
Et de maintes autres couleurs,
Par l'ordonnance de Nature.

Mais vous, Yver, trop estes plain
De nege, vent, pluye et grezil ;
On vous deust banir en essil**.
Sans point flater, je parle plain,
Yver, vous n'estes qu'un villain !

(*) matin
(**) exil
Hiver vous n'êtes qu'un vilain (1).
Eté est plaisant et gentil,
En témoignent Mai et Avril
Qui l'accompagnent soir et ma(t)in.

Eté revêt champs, bois et fleurs
De sa livrée de verdure
Et de maintes autres couleurs
Par l'ordonnance de Nature.

Mais vous, Hiver, trop êtes plein
De neige, vent, pluie et grésil;
On vous doit bannir en exil.
Sans point flatter, je parle plain (2),
Hiver vous n'êtes qu'un vilain (1) !

(1) rustre (paysan)
(2) juste (droit)


Rondeaux, Charles d'Orléans (1394-1465)


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vendredi 26 décembre 2008

Méthode infaillible pour paralyser une ville

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Cathédrale Sainte-Cécile sous la neige - Janvier 2006
Cathédrale Sainte-Cécile sous la neige - Janvier 2006 - Photo PetitChap


La neige était annoncée depuis quelques jours déjà, mais elle ne daignait pas montrer le bout de son nez... Oh, les vieux disaient bien « hum... ce petit air sent la neige... », mais on les traitait de vieux fous... Il ne neige pas à Albi. Jamais. Dans le pire des cas, il neigeouille une petite demie-journée tout au plus... Même pas de quoi blanchir les toits.


Dans la cour du Palais de la Berbie
Dans la cour du Palais de la Berbie - Janvier 2006 - Photo PetitChap


Il y a trois ans, la ville s'est réveillée un samedi matin sous une trentaine de centimètres de neige. La situation était tellement inhabituelle qu'elle en était devenue merveilleuse... Entendez "merveilleuse" dans le sens "féerique"... Il avait neigé toute la journée ; en fin de journée, il y avait entre 30 et 40 centimètres de neige suivant les endroits. Il y avait un monde fou en ville, les gens se promenaient le sourire aux lèvres, les appareils photo en bandoulière... J'ai dû faire près de 200 photos... Et puis les gens se parlaient, s'accostaient, plaisantaient... entre inconnus... C'était étrange mais vraiment rigolo ! Je me souviens d'une pauvre dame dans sa voiture, elle n'arrivait pas à monter la côte sous la cathédrale. La voiture patinait, la dame paniquait grave. Un groupe de jeunes d'une petite vingtaine d'années était venu spontanément l'aider... Voilà une chose que l'on ne voit pas en temps normal ! Et puis certaines personnes se déplaçaient en ski... ou en snowboard... Vision carrément insolite dans cette ville qui ne connait pas la neige !


La terrasse du restaurant Le Géopoly
La terrasse du restaurant Le Géopoly - Janvier 2006 - Photo PetitChap


Le côté un peu plus "sombre" de l'histoire, c'est que la ville n'étant pas habituée à la neige, nous ne sommes absolument pas équipés pour parer à ce genre de situation. Les agents municipaux n'ont pas - ou très peu - d'engins pour déneiger, pour saler ou que sais-je encore... Le résultat est là encore relativement comique (comique suivant votre situation, suivant si vous devez absolument vous déplacer ou non) : la ville est paralysée !


Bonhomme de neige dans le jardin du cloître Saint-Salvy
Bonhomme de neige dans le jardin du cloître Saint-Salvy
Janvier 2006 - Photo PetitChap


Et voilà donc que le scénario se reproduit : il neige depuis ce matin 8h00... Les flocons sont énormes, il neige sans discontinuer... Les oliviers de la place Sainte-Cécile sont blancs de neige... Je vous accorde que c'est magnifique : la cathédrale, le Palais de la Berbie (qui renferme le musée Toulouse-Lautrec), ses jardins à la française, les berges du Tarn, la place du Vigan et les ruelles... tout est blanc... Les gamins - et leurs parents - improvisent des batailles de boules de neige... Les gens sont de bonne humeur... Et puis avoir de la neige pour les vacances de Noël, c'est chouette...


Cathédrale Sainte-Cécile
Cathédrale Sainte-Cécile - Janvier 2006 - Photo PetitChap


M'enfin... Je ne suis pas en vacances, ce qui implique donc que je suis obligée de me servir de mon nouveau bolide... Et je ne sais pas conduire sur la neige... Et quand bien même je tenterais les déplacements à pied, je doute que mes super Kickers adhèrent correctement au sol enneigé et m'évitent la chute humiliante...!


Église Saint-Salvy et Alby foie gras
Église Saint-Salvy et Alby foie gras - Janvier 2006 - Photo PetitChap


La neige, c'est joli et c'est chouette... mais uniquement chez les autres !


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mercredi 24 décembre 2008

La-pin !! kkll-kkll !! La-pin !!

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« Les sages ont plus à apprendre des fols que les fols des sages. »
Montaigne


Le désespéré - Gustave Courbet
Le désespéré (Autoportrait) - Gustave Courbet, 1841 - Collection particulière


De la gestion de la folie... ou des joies de bosser dans un service public...

Serait-ce dû au mauvais temps actuel, aux brouillards givrants, à la neige tant promise mais toujours absente ? Peut-être est-ce dû au manque de clarté naturelle ou au stress de l'approche des fêtes de fin d'année... Je ne sais pas... Quoi qu'il en soit, les fous sont de sortie !

Pas plus tard que jeudi dernier, un petit malin de 18 ans a déballé ses attributs masculins devant une pauvrette de 17 ans qui n'en avait, semble-t-il, jamais vu "en vrai". Bon... le jeune homme, complètement largué, n'a même pas tenté de fuir. Il est resté là en attendant que la police arrive... « Ben oui, appelez la police... j'ai déconné... », nous disait-il... Il est parti la tête basse, les menottes aux poignets.

Le lendemain, un deuxième exhibitionniste est venu se masturber allègrement dans un de nos fauteuils, face à de jeunes étudiantes... Il s'est gentiment envoyé en l'air, puis il est parti... Il n'a pas attendu que la police arrive, lui...

Mais pourquoi ne font-ils pas ça devant moi ?! Je crois que je prendrais un malin plaisir à leur foutre une petite honte....!! « Ben quoi ?! T'es à fond ?! C'est tout l'effet que je te fais... pff... vraiment, c'était pas la peine de te désaper, mon gars !! ». Excellent !

Ajoutez à ça tous les fous "habituels" :
  • il y a celle qui un jour est chrétienne, le lendemain musulmane... et puis qui picole, aussi... et qui est entrée hier dans la médiathèque en vélo et en hurlant ;

  • il y a celui qui, alcoolique de son état, ne retrouvait pas les escaliers pour sortir de la médiathèque, hurlait je-ne-sais-trop quoi à propos de l'Afghanistan, et concluait régulièrement ses phrases par un « Et vous donnez du bonheur aux gens ou vous donnez pas du bonheur aux gens ?! » ;

  • il y a celui qui ne comprend jamais ce qu'on lui dit, qui pense qu'on le traite de débile alors qu'on lui parle d'encre indélébile... et qui nous demande quasiment tous les jours le même CD : celui de Julio Iglesias, « vous savez, celui qui chante "Vous les femmes"...! » ... et puis qui est carrément agressif ;

  • il y a celui qui se prend pour un poète et un artiste et qui tentait ce matin encore de me vendre des cartes postales de son cru... ;

  • il y a celui qui demande toujours les mêmes CD, « Est-ce que vous avez... Bananarama ?! Est-ce que vous avez.... Kim Wilde ?! Et est-ce que vous avez... Nadiya ?! Et puis il est rigolo (quand il n'est pas agressif) parce qu'il est très maniéré et qu'il a un beau cheveu sur la langue... [je tiens à souligner que nous avons ces CD, achetés d'ailleurs la plupart du temps parce que ce monsieur nous les réclamait...] ;

  • il y a sa "copine", aussi... son binôme dans les sorties psy, en fait... Elle, elle est carrément méchante, et puis elle est toute tordue de partout, quasiment pliée en deux avec la tête bloquée sur un côté... assez étrange, plutôt flippant, même...! Et puis elle adore Hélène Ségara... Et puis elle aime beaucoup donner des ordres, aussi... « Et puis vous me donnez une poche, hein !! » ;

  • il y a la dame qui a un sourire figé, et qui, quoi qu'elle dise, sourit bêtement en vous fixant... sa demande fétiche est « et vous avez quoi de bien, comme film ?! Moi j'aime bien les films drôles, hein, mais des nouveaux, hein, pas des vieux... » Toujours la même demande... Ce qui est flippant, c'est que son mari semble tout à fait normal... Le pauvre...
Et puis il y a tous ceux qui ne sont que légèrement atteints et qu'on ne remarque même plus... Que du bonheur...!

Petite note perso pour ma petite collègue qui est malade et qui n'a donc pas pu se joindre à nous aujourd'hui : si, si, je t'assure... ils sont tous venus aujourd'hui... Magnifique !!

Pour tous ceux qui hésitaient encore sur leur avenir professionnel : ne vous posez plus de questions, intégrez le monde merveilleux des médiathèques municipales... C'est spectacle garanti toute l'année !!

M'enfin, moi je m'en fout, ce soir dès minuit, il y a « Recherche du barbu »... Bière et rhum à foison, Tavernier !! J'imagine que vous avez déjà oublié l'explication que je vous avais donné l'an dernier à propos de cette belle tradition, je vous invite donc à aller lire cet article...

En attendant, je vous souhaite de passer un très joyeux noël... soyez mignons !


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lundi 15 décembre 2008

Les yeux seuls sont capables de pousser un cri...

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Les yeux seuls sont capables de pousser un cri.
René Char


Les yeux sont, parait-il, le reflet de l'âme.... Je n'en sais rien ; ce que je sais, en revanche, c'est que je suis fascinée par les regards...















J'aurais bien mis quelques photos de personnes de ma connaissance, mais il parait que ça ne se fait pas... Et pourtant...


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dimanche 14 décembre 2008

Dies Dominicus...

Je ne puis pas encore m'expliquer aujourd'hui, à cinquante-deux ans,
la disposition au malheur que me donne le dimanche.

Stendhal
Extrait de la
Vie de Henry Brulard


Nighthawks - Edward Hopper
Nighthawks, Edward Hopper (1942)


Je n'aime pas le dimanche. Je ne l'ai jamais aimé. Jour de la semaine où tout s'arrête, jour officiel du repos. Jour qui me glace le sang.

Je suis angoissée, anxieuse par nature... et je traine ça depuis ma prime enfance. Je me souviens par exemple que lorsque j'allais à l'école primaire, un ramassage scolaire venait nous chercher, mon frère et moi, pile poil devant la maison familiale. Le "ramassage" s'effectuait en voiture, par une dame que nous connaissions très bien (auriez-vous oublié que je suis native d'un tout petit village où tout le monde est forcément de la famille ?!). Autant dire que la dame en question ne serait certainement pas partie sans nous. Mais voyez-vous, j'étais terrorisée à l'idée de rater l'heure de passage de la voiture. Résultat, j'étais déjà au bord de la route, mon cartable sagement posé à mes pieds, au moins 20 minutes avant que la dame n'arrive... Mon frère, lui, était à peine sorti du lit... Il n'a jamais eu ce genre d'angoisse. Mes parents ont bien évidemment essayé de me raisonner, de m'expliquer qu'il ne servait à rien que je m'angoisse pour ce genre de choses, mais que voulez-vous, on ne se refait pas. J'ai bien été "sous traitement" (homéopathique) pendant quelques années, ce qui a un brin calmé tout ça, mais ça n'a rien soigné... Et puis ces angoisses ne vont pas sans quelques douleurs physiques, réelles ou fantasmées... mais des douleurs quand même... d'autant plus douloureuses, d'ailleurs, qu'elles sont incomprises de l'entourage...

Bien... mais quel est le rapport avec les dimanches ? Il n'y en a pas vraiment... Ceci dit, cette anecdote - qui me fait sourire aujourd'hui, même si je sais bien que je fonctionne toujours comme ça - illustre parfaitement cet aspect "angoissé" de ma petite personne. Et les dimanches m'angoissent, encore plus en cette saison. J'ai des images bien précises des dimanches soirs de mon enfance. Ce jour-là, jour officiel de la famille, nous ne dérogions pas à la règle. Nous habitions la maison voisine de celle de mes grands-parents paternels. Ma grand-mère était une vraie matriarche ; je la voyais plutôt comme un tyran, mais passons... Mes oncles, tantes, cousins, cousines venaient donc passer quasiment tous leurs dimanches chez la mamie. C'est d'ailleurs à se demander à quel moment mes tantes allaient visiter leur belle-famille... Mes cousins-cousines s'échappaient de chez la grand-mère pour venir squatter notre maison et nos jeux. Ce n'était pas franchement désagréable, et nous avons d'ailleurs passé d'excellents moments... mais je ne pouvais m'empêcher de penser au moment où tout ce petit monde allait repartir. Ce moment m'angoissait grave... Ils partaient toujours à la même heure, entre 18h et 18h30, la nuit était déjà tombée. Ils repartaient tous vers un monde certainement magnifique, nous laissant, mon frère et moi, dans un silence aussi assourdissant que l'après-midi avait été bruyant... Nous allumions alors la télévision, certainement pour combler ce silence, et c'était toujours les mêmes choses qui passaient : Cat's eyes, l'ours Gaby (du dessin animé Les petits malins), Renard, et plus tard Benny Hill... Et ce moment où nous allumions la télé me foutait méchamment le bourdon... Il signifiait que la semaine allait reprendre, qu'il faudrait repartir à l'école... Je me sentais alors dans un état de solitude extrême, et je me sentais d'autant plus seule que personne ne comprenait. "Profite de ce jour de repos...", qu'ils disaient... Mais je ne pouvais pas... Solitude, incompréhension, angoisse... et les douleurs qui allaient avec...
Rien n'a changé aujourd'hui (hormis la programmation télé, bien sûr !). Mes angoisses dominicales sont toujours bien présentes, même si je les ai apprivoisées. Elles sont largement moins fortes, elles ne génèrent absolument plus de douleurs... mais elles n'ont pas disparu.

Je ne sais pas bien expliquer tout ça. Le dimanche me semble être un sas entre deux mondes, un no man's land. La plupart des gens apprécient ce jour, ils se détendent, ils rencontrent leur famille ou leurs amis, ils pratiquent une activité sportive ou autre... Les gens aiment à vous dire : "Rhôoo, vivement dimanche !!" ... Ben moi, je me sens bien plus à mon aise le reste de la semaine...

Je sais, je sais... j'ai un besoin très urgent d'aller consulter un psy...

Heu... pour l'illustration, ne cherchez pas de lien particulier avec mes angoisses ou avec les dimanches... C'est simplement qu'il m'inspire de la solitude, un mélange de tristesse et de mélancolie, et un soupçon d'angoisse aussi... Je suis certaine que cette scène se déroule un dimanche soir... voilà voilà...


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jeudi 11 décembre 2008

Le Bolide est mort... vive le Bolide !

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Grand prix d'Albi 1951, Louis Rosier
Photographie de Jean Dieuzaide


Il fallait bien que nous nous séparions... Dix ans de bons et loyaux services, mais elle arrivait en fin de vie. Voilà au moins trois ans que son levier de vitesse se réduisait à une simple tige (un peu trop pointue en son bout) ; elle était fatiguée au point de ne plus parvenir à garder l'eau qui refroidissait son moteur ; ses freins ne répondaient plus très bien, mais je les connaissais et j'arrivais à bien les maîtriser... Et puis elle avait ses caprices, comme tout artiste qui se respecte... Elle refusait tout net de repartir si elle était au repos depuis plus de 10 minutes... il fallait alors attendre une grosse heure avant de pouvoir redémarrer son moteur... Mais les règles du jeu étaient connues, elles étaient même acceptées... Tel était feu mon bolide...

Hier soir, il a rejoint sa dernière demeure, il a effectué son dernier voyage... dans la nuit et le froid. Sa dernière représentation...

Le nouveau bolide est donc arrivé hier soir... dans le froid et la nuit. Bolide petit, blanc. Et c'est le grand luxe : fermeture centralisée des portes, direction assistée, vitres électriques... Waouh... Nous devons encore apprendre à nous connaitre, et il va être très difficile d'oublier feu le petit bolide, mais bon... l'appel du luxe risque d'être plus fort...!

Que la bière de Noël coule à flot !!


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dimanche 7 décembre 2008

Le retour des petits poèmes dominicaux...

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Herbert James Draper (1864-1920), Pot Pourri


Mon rêve familier

Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.

Car elle me comprend, et mon cœur, transparent
Pour elle seule, hélas ! cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

Est-elle brune, blonde ou rousse ? - je l'ignore.
Son nom? je me souviens qu'il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la Vie exila.

Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.


Paul Verlaine, Poèmes saturniens


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mercredi 3 décembre 2008

La gourmandise

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Grotte de Lascaux


La gourmandise... il a bien fallu qu'elle ait un commencement... parce que voyez-vous, il n'a pas toujours été agréable de manger. Manger de la viande crue, régulièrement avariée, devait provoquer d'assez méchants maux d'estomac, sans parler des petites troubles intestinaux... On peut donc imaginer assez facilement que l'apprivoisement du feu a participé à la naissance de la gourmandise...

Pourquoi j'ai mangé mon père, roman de Roy Lewis, n'est qu'une fiction, mais j'aime à penser que la gourmandise est née comme ça :


« Cependant, à mesure que nous approchions, nous nous coulions des regards inquiets. J'avais senti que quelque chose clochait. Oswald le renifla aussi. Puis Alexandre, les filles et même Tobie suant et ahanant plié en deux. Ce fut Oswald pour finir qui exprima notre pensée à tous.
- Qu'est ce donc qui pue à ce point ?
- Ca me rappelle quelque chose, dis-je, mais je n'arrive pas à préciser quoi.
- Ce n'est ni du cadavre ni du volcan, ça sent comme qui dirait entre les deux, renifla Oswald.
Je me demande s'il n'y a pas eu un accident ici où ailleurs.
- C'est pas désagréable, je trouve, dit Alexandre. Et même ça me produit un drôle d'effet :
j'en ai l'eau à la bouche.
- C'est ma foi vrai, dîmes-nous les uns après les autres.
- Allons-y, dit Oswald, vaut mieux se rendre compte.
Nous forçâmes l'allure, Tobie et Caroline suivant laborieusement en arrière-garde. L'odeur étrange, piquante, provocante croissait à chaque pas. Nous aperçûmes, avec soulagement, la horde au complet assise autour du feu. Toutefois celui-ci pétillait, crépitait, crachotait de façon anormale. Tous les quelques moments une tante ou l'autre se levait, fichait un bâton dans les braises et le ramenait à elle avec, au bout, une masse grésillante.
- Mais ...... c'est du jarret de cheval ! haleta Oswald.
- Et ça une côtelette d'antilope ! dis-je à mon tour.


Grotte de Lascaux


Nous courûmes les derniers cent mètres, talonnés de près par les autres, et nous fîmes irruption dans le cercle de famille.
Cela fit sensation.
- Bienvenue, les enfants ! s'écria père, passé la première surprise.
- Bienvenue, s'écria mère, et je vis couler des larmes de joie sur son cher visage zébré de suie.
Juste à l'heure pour dîner ! ajouta-t-elle en riant.

Et puis ce furent les exclamations sans fin, les étreintes, les reniflements, les rires, les embrassades, les présentations. [...]
- Maman, mais qu'est ce que tu fais là ? Tu te sers de bonne viande comme de bois à brûler ?
- Mon Dieu, mon rôti ! s'écria mère en se précipitant vers le feu. Complètement oublié, avec ces retrouvailles. Il va être trop cuit ... gémit-elle et, en hâte, elle retira du feu un gros morceau fumant de râble d'antilope. J'en étais sûre, ce côté-là est complètement brûlé, dit-elle en l'examinant. Heureusement qu'Ernest m'a prévenue.
- T'en fais pas, ma chérie, dit père. Tu sais que j'aime le roussi bien croquant. Je prendrai l'extérieur avec plaisir.
Pour moi, tout ce dialogue était du latin.
- Mais enfin, de quoi parlez-vous ? suppliai-je abasourdi.
- De quoi ? Mais de cuisine, tiens !
- Mais qu'est ce que c'est que toute cette cuisine ? m'énervai-je.
- Notre dîner, dit père. Et tout à coup : Oh ! mais j'y pense, c'est vrai que c'est nouveau pour vous, tout ça ! Votre mère ne l'avais pas encore inventé, fils, avant votre départ. Cuisiner, mes enfants, cela veut dire ... eh bien c'est une façon de préparer le gibier avant de le mastiquer. Une méthode entièrement nouvelle pour ... euh !... réduire les muscles et les ligaments dans ... euh !... une forme plus friable, de sorte que ... eh bien ...


Grotte de Lascaux


Mais cessant de froncer le sourcil, il se mit à sourire gaiement :
- Oh, après tout, pourquoi essayer d'expliquer ? Le mouvement se prouve en mangeant? Goûtez et voyez vous-mêmes.
Nos compagnes et nous faisions cercle autour de l'étrange morceau de viande, noirci, rétracté, mais plein d'arôme, que mère nous présentait. Les femmes, décontenancées et que le feu avait quelque peu effrayées déjà, reculaient timidement. Mais Oswald, vaillamment, leva son mufle, mordit dans la tranche de viande que mère, d'une lame de silex, avait habilement détachée, la poussa du doigt dans sa bouche. Aussitôt son visage devint cramoisi. Il postillonna, s'étrangla, suffoqua, déglutit violemment et se tortilla sur lui-même. L'eau jaillit de ses yeux tandis qu'il se tapotait follement les lèvres et la gorge, en haletant.
- Oh ! désolé, Oswald ! dit père. Bien sûr, tu ne pouvais pas savoir. J'aurais dû te prévenir que c'était très chaud.
- Cours à la rivière, mon petit, dit mère et bois un peu d'eau, ça te soulagera.
Dans un éclair Oswald eut disparu, et un moment plus tard nous entendions le bruit d'un violent plongeon.
- Nous autres, nous y sommes habitués, dit père, mais au début il faut s'y prendre avec précaution. Le mieux c'est de souffler dessus pour commencer, puis de mordiller petit à petit par l'extérieur. Mais vous verrez qu'en un rien de temps vous vous débrouillerez très bien.
Munis de ce mode d'emploi, nous nous mîmes au travail. Oswald nous avait rejoints. Nous nous brulâmes quand même un peu pour commencer, mais ça valait la peine. On eut dit que la viande, sous nos dents, capitulait sans condition. Le goût, ce mélange de cendre et de chair brûlée, de filets attendris et de graisse fondante, était enivrant. Et le jus ! Ce jus rouge ! De l'ambroisie.
A peine s'il fallait encore mastiquer sérieusement. La puissance élastique d'un muscle strié, qui avait imprimé à un gnou de trois cent kilos une vitesse de quatre-vingt à l'heure, vous fondait littéralement sur la langue. Ce fut une révélation. [...]
- C'est du génie, dit père avec un profond respect. Du pur génie. Un pas incalculable pour toute l'espèce. Les possibilités sont prodigieuses. »

Extrait de Pourquoi j'ai mangé mon père de Roy Lewis



Mammouth - Grotte de Pech-Merle


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